À la mort de son épouse Birgit, Kaspar découvre un pan de sa vie qu'il avait toujours ignoré : avant de quitter la RDA pour passer à l'Ouest en 1965, Birgit avait abandonné un bébé à la naissance.Intrigué, Kaspar ferme sa librairie à Berlin et part à la recherche de cette belle-fille inconnue. Son enquête le conduit jusqu'à Svenja, qui mène une tout autre vie que lui : restée en Allemagne de l'Est, elle a épousé un néo-nazi et élevé dans cette doctrine une fille nommée Sigrun.Kaspar serait prêt à voir en elles les membres d'une nouvelle famille. Mais leurs différences idéologiques font obstacle : comment comprendre qu'une adolescente, par ailleurs intelligente, puisse soutenir des théories complotistes et racistes ? Comment l'amour peut-il naître dans ce climat de méfiance et de haine ?Cette rencontre contrariée entre un grand-père et sa petite-fille nous entraîne dans un passionnant voyage politique à travers l'histoire et les territoires allemands. Plus de vingt-cinq ans après Le liseur, Bernhard Schlink offre de nouveau un grand roman sur l'Allemagne qui sonde puissamment la place du passé dans le présent, et nous interroge sur ce qui peut unir ou séparer les êtres.
Dans sa classe de onze enfants, Hannah se sent exclue de tout : ses parents, fondamentalistes protestants, ne l'autorisent à se rendre ni au cinéma, ni aux fêtes d'anniversaire et pas non plus à la sortie de fin d'année. Ce 25 juin 1993 est le dernier jour d'école et, malgré les Troubles qui semblent ne jamais vouloir finir, tous rêvent d'un été insouciant.
Mais une inquiétude d'une autre espèce s'installe à Ballylack, localité imaginaire d'Irlande du Nord qui n'est pas sans rappeler Ballymena, où est née l'auteure : Ross, un condisciple d'Hannah, meurt d'un mal inconnu et mystérieux, bientôt suivi par Kathleen. Parce que les deux premières victimes étaient de faible constitution, la communauté tente de se rassurer. Mais, quand les camarades d'Hannah disparaissent les uns après les autres, la panique s'installe. Ballylack est envahie par des équipes scientifiques chargées de découvrir l'origine de cette épidémie ne frappant que les enfants, devenue une affaire nationale. Et, bien sûr, des hordes de journalistes leur emboîtent le pas.
Hannah n'est atteinte d'aucun symptôme. Mais elle vit une expérience qu'il lui est impossible de confier à quiconque : un à un, les fantômes de ses amis viennent la hanter.
Si Jan Carson, grande amatrice de réalisme magique, embarque son lecteur dans des situations où tout peut arriver, c'est avec une scrupuleuse précision et une ironie mordante qu'elle scrute les effets de la crise sur les habitants du bourg. Maîtresse dans l'art du récit, elle met à nu ses personnages, notamment les parents des petites victimes, dont elle construit des portraits formidables de véracité et d'énergie.
Le corps d'une jeune fille abandonné dans la neige, l'épave d'un avion échoué au fond des eaux, un homme en fuite. Autant d'images qui illuminent le nouveau roman de Cormac McCarthy. Des rues de La Nouvelle-Orléans aux plages d'Ibiza, son héros, Bobby Western, conjugue sa mélancolie à tous les temps.
Cet homme d'action est aussi un mathématicien et un physicien, deux disciplines qu'il a abandonnées après la mort de sa soeur Alicia, disparue mystérieusement dix ans plus tôt. Hanté par la culpabilité, Western trouvera-t-il enfin le repos ?
Roman noir, histoire d'une passion, Le Passager est aussi une parabole sur le déracinement de l'homme moderne.
À quatre-vingt-dix ans, Cormac McCarthy nous surprend une fois de plus par son audace. Entre une conversation sur la physique quantique, un traité de la solitude et la description d'une tempête dans le golfe du Mexique, il se joue des conventions et demeure l'un des romanciers les plus singuliers de notre époque.
Edith Hope, l'héroïne d'Hôtel du lac, s'est retirée mystérieusement sur les bords du Léman, contrainte de s'éloigner de ses proches. Elle y demeurera jusqu'à la fin de la saison d'été, isolement qui donnera lieu à toutes les spéculations. Que s'est-il passé ? La narratrice nous révélera progressivement comment elle a voulu changer sa vie.
Le temps passé à l'Hôtel du lac est l'occasion pour l'autrice de dépeindre les caractères les moeurs et les vies cachées des pensionnaires, dont la vérité de chacun finira par éclater. Parmi eux se trouvent Monsieur Neville avec lequel une relation particulière se noue, une vieille comtesse, le patron de l'établissement... Dans cette atmosphère singulière de huis-clos s'ébauche une histoire en clair-obscur...
Hôtel du lac a obtenu en 1984 le Booker Prize, le plus important et prestigieux prix littéraire britannique. Dès son entrée en littérature, Anita Brookner fut considérée comme l'une des romancières anglaises majeures. Elle est lue et traduite dans le monde entier.
Emily Dickinson aurait pu ne jamais être pour nous qu'un nom étranger. Celui d'une femme, américaine, moins connue pour son talent littéraire que pour avoir passé la majeure partie de sa vie confinée chez elle. Puisqu'elle s'était toujours farouchement refusée à voir ses écrits publiés, rares sont ceux qui savaient, de son vivant (1830-1886), qu'Emily était aussi une formidable poète. Peu avant son décès, elle demande à sa soeur Lavinia de brûler tous ses papiers personnels. Mais lorsque cette dernière découvre dans sa chambre des centaines de poèmes renversant de beauté, griffonnés sur des morceaux d'enveloppes ou d'emballages, elle est à la fois sidérée et incapable de lui obéir. Jusqu'où la volonté des morts peut-elle changer l'existence des vivants ? Ne pas les suivre, est-ce les trahir ? Et si les mots pouvaient faire revivre les disparus - et celles et ceux qui leur survivent ? Lavinia choisit la vie. Et décide de confier ces poèmes à deux femmes autrement endeuillées, d'abord sa belle-soeur, Susan, épouse de son frère, puis Mabel, maîtresse de ce dernier, pour qu'elles l'aident à les faire publier. Une ultime complice leur prêtera main-forte : Millicent, fille de Mabel, qui grâce à sa malice se révélera la plus juste lectrice de la « dame en blanc ». Tour à tour on les suit, Lavinia, Susan, Mabel et Millicent, dans une narration où surgit par endroits le je de l'auteure se joignant à elle pour les accompagner.
Dans ce roman profond et envoûtant, Dominique Fortier prolonge la vie d'Emily Dickinson en racontant la grande aventure qui mènera ces héroïnes anonymes à faire paraître ses poèmes pour la première fois. Texte lumineux sur le deuil, l'absence, la poésie, le pouvoir des mots et l'importance de la littérature, Les ombres blanches nous fait assister à la naissance d'une oeuvre qui aurait pu ne jamais voir le jour, et à la renaissance de trois femmes. On le lit comme on observe, au printemps, le retour de la vie. Ou comme on lit la poésie d'Emily Dickinson : avec bonheur et ravissement.
Au royaume du hasardje suis le maître du tempstransporte des milliers de coeursdes millions de battementsIl me suffit de cravater quelques commutateurset j'avancerai l'heure de chacun d'entre euxJe ne sonne pas le tocsin, ni ne détiens de pouvoir divinje conduis le train
« Écoute, le sol se dérobe, les mots dérapent ; partout, nos appuis s'érodent. Nous vivons «au-dessus» du monde, dans des bulles d'histoires ; ce que nous voyons, au loin, depuis cette hauteur, c'est une Terre abîmée, épuisée. Nous entrons dans un temps vertigineux. Et moi, figure-toi, avec les livres qui m'ont accompagné, j'ai voulu saisir les formes de ce vertige. Comprendre cette guerre, ce combat, et cette blessure, entre les langages humains et les autres formes de la vie. ».
Une histoire du vertige, à sa façon unique, est un livre d'aventures. Il s'ouvre sur la cavale de Don Quichotte : cet être envoûté par la fiction, et qui nous ressemble tant. Et à partir de là, il tourne inlassablement autour d'une espèce : la nôtre, en se demandant comment nous détruisons nos appuis terrestres ? Fresque du temps présent, de nos vertiges face à la crise écologique et aux épreuves de la guerre, le livre s'adresse à un lecteur imaginaire : un ami, un frère ou une soeur, un compagnon. Il parle de nous, de notre perte d'équilibre, de notre sentiment que plus rien ne tient, que tout s'effondre ; mais en nous apprenant, petit à petit, à tenir dans le vertige. En nous reliant à un monde infini, beaucoup plus vaste, où les petits « Je » des modernes s'effacent.
Je voudrais raconter les éditions de Minuit telles que je les voyais enfant. Et aussi mon père, Jérôme Lindon, comme je le voyais et l'aimais. Y a-t-il des archives pour ça? Et comment être une archive de l'enfant que j'ai été?
Il existe à New York une rue au nom évocateur : Division Avenue. Elle se situe dans une partie spécifique de Brooklyn, le quartier juif orthodoxe. C'est là que vit Surie Eckstein, qui peut s'enorgueillir d'avoir vécu une vie bien remplie : mère de dix enfants, elle passe des jours tranquilles avec sa famille. Alors qu'elle pensait être ménopausée, Surie découvre qu'elle est enceinte. C'est un choc. Une grossesse à son âge, et c'est l'ordre du monde qui semble être bouleversé. Surie décide de taire la nouvelle, quitte à mentir à sa famille et à sa communauté. Ce faisant, Surie doit affronter le souvenir de son fils Lipa, lequel avait - lui aussi - gardé le silence sur une part de sa vie. Un secret peut avoir de multiples répercussions ; il permettra peut-être à Surie de se réconcilier avec certains pans de son passé.
Avec Division Avenue, Goldie Goldbloom trace le portrait empathique, tendre et saisissant d'une femme à un moment charnière de son existence. Et nous livre un roman teinté d'humour où l'émancipation se fait discrète mais pas moins puissante.
Comment passe-t-on de champion de ski à Prix Nobel de la paix ? De héros polaire à créateur d'un statut pour les réfugiés ?
Alexis Jenni raconte à la façon d'un roman la vie extraordinaire de Fridtjof Nansen, homme doué en tout, qui fut champion du monde de patinage, consacra ses travaux scientifiques au système nerveux, dessinait fort bien et écrivait d'une plume remarquable. L'histoire d'un homme qui traversa le Groenland à ski puis tenta d'atteindre le pôle Nord et devint héros national norvégien. Un homme qui oeuvra pour le rapatriement des prisonniers de guerre, puis créa un passeport destiné aux centaines de milliers d'apatrides laissés pour compte par l'effondrement des empires en 1918. Un homme qui sauva des milliers de vies et qui se demandait avec mélancolie s'il n'avait pas raté la sienne.
Sublime roman [...] Harlem Shuffle est un page turner comme Colson Whitehead sait si bien en faire. Livres HebdoPetites arnaques, embrouilles et lutte des classes... La fresque irrésistible du Harlem des années 1960.Époux aimant, père de famille attentionné et fils d'un homme de main lié à la pègre locale, Ray Carney, vendeur de meubles et d'électroménager à New York sur la 125e Rue, « n'est pas un voyou, tout juste un peu filou ». Jusqu'à ce que son cousin lui propose de cambrioler le célèbre Hôtel Theresa, surnommé le Waldorf de Harlem...Chink Montague, habile à manier le coupe-chou, Pepper, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, Miami Joe, gangster tout de violet vêtu, et autres flics véreux ou pornographes pyromanes composent le paysage de ce roman féroce et drôle. Mais son personnage principal est Harlem, haut lieu de la lutte pour les droits civiques, où la mort d'un adolescent noir, abattu par un policier blanc, déclencha en 1964 des émeutes préfigurant celles qui ont eu lieu à la mort de George Floyd.Avec Harlem Shuffle, qui revendique l'héritage de Chester Himes et Donald Westlake, Colson Whitehead se réinvente une fois encore en détournant les codes du roman noir. C'est vivant, bruyant, caracolant. C'est Whitehead. L'Obs Un réjouissant tourbillon [...] Une belle leçon d'histoire et d'humanité en mode thriller. Les Echos
L'île rebelle permet de saisir l'ampleur et les nombreuses particularités de la poésie des dernières décennies d'Angleterre, de Galles et d'Écosse, constituant l'anthologie de référence en édition bilingue pour la poésie britannique contemporaine. La poésie britannique, aux antipodes du symbolisme et du formalisme hexagonaux, est le plus souvent narrative et discursive et plus encline à solliciter l'humour ou le registre social. Un humour au reste essentiellement assumé par les femmes qui représentent près du tiers des auteurs ici retenus.
J'ai fixé les yeux de celui qui me demandait de le suivre jusqu'au bout du monde. J'y ai vu la rivière, le lac long et, au milieu, moi et ce jeune homme aux larges épaules et au regard confiant.
Almanda a 15 ans quand elle tombe amoureuse de Thomas, jeune Innu de l'immense lac Pekuakami. Orpheline québécoise d'origine irlandaise, elle quitte les siens pour le suivre dans cette existence nomade, brisant bientôt les carcans imposés aux femmes autochtones pour apprendre la chasse et la pêche. Ancré dans une nature omniprésente, sublime et très vite menacée, son destin se mêle alors à celui, tragique, d'un peuple ancestral à la liberté entravée.
Prix Nature Nomade 2021.
Prix VLEEL 2020.
Prix France-Québec 2020.
Nous sommes en 1997. Après avoir passé quelques années à l'écart pour se faire oublier, loin de Londres et du bruit du monde, Tomas Nevinson accepte une nouvelle mission et redevient un agent des services secrets britanniques. Il doit se rendre dans une ville du nord-ouest de l'Espagne pour identifier et neutraliser une femme originaire d'Irlande du Nord qui s'y cacherait sous les traits de trois personnes différentes. On sait qu'elle est rusée et dangereuse ; on sait que son nom est associé à des attentats sanglants de l'IRA et de l'ETA, et qu'elle pourrait, elle aussi, reprendre du service à tout moment si l'une des organisations terroristes le lui demandait. Tomas Nevinson va devoir la confondre, mais la tâche ne sera pas aisée, car s'immiscer dans la vie d'autrui n'est pas sans risques, surtout quand on ignore jusqu'où cela peut nous entraîner.Derrière ce jeu de masques, qui se double d'un jeu de séduction, Javier Marias nous offre une réflexion passionnante sur ce qui peut être fait au nom du bien commun et sur la difficulté à déterminer ce qu'est le mal et comment l'on peut ou l'on doit le combattre. «Tu ne tueras point sauf si...» : voilà l'impératif moral qui hante les jours et les nuits de notre protagoniste, un héros aux mille visages, comme les grands comédiens, qui croyait avoir déjà tout vécu et à qui, apparemment, plus rien ne pouvait arriver.
Été 1969. Skip tourne les pages du journal et s'arrête sur une annonce : « Perdu 16 juillet après-midi quartier Champs-Élysées, anneau argent avec inscription : Katerine-6-5-9. Forte récompense. Répondre au journal qui transmettra ».
Pas besoin de vérifier dans sa poche intérieure, cette alliance, il l'a subtilisée. Il avait flairé le bon coup, avait été déçu de ne pas trouver de portefeuille ou de montre. L'alliance, elle, était venue toute seule bien que cette manipulation soit parmi les plus difficiles pour un pickpocket. Skip pourrait obtenir un beau pactole en la restituant mais prend peur quand il s'aperçoit qu'il a détroussé Grégoire Molyneux, un caïd des affaires et de la finance. Et Katerine, quel genre d'épouse est-elle ? Skip d'ordinaire se contente de croiser ses victimes, il ne les suit pas. C'est pourtant ce qu'il fait en emboîtant le pas de Katerine. En épiant les Molyneux, il dérobe désormais une partie de leur vie. Quitte à révéler la sienne.
Le sens de l'observation est essentiel quand on est pickpocket. Jean-Hubert Gailliot le possède aussi, au plus haut degré, en recréant de manière frappante l'ambiance du Paris de la fin des années 1960. Mêlant roman noir et étude de moeurs, il fait se croiser deux mondes qui habituellement ne se mélangent pas, celui des bourgeois et celui des voyous.
Un homme vit paisiblement à la campagne avec sa femme Livia, son chien Pablo et le chat Lennon. Pour cet écrivain parvenu à l'aube de la vieillesse, l'essentiel n'est plus tant dans ses actions que dans sa façon d'habiter le Monde, et plus précisément dans la nécessité de l'amour. À intervalles réguliers, il reçoit la visite de son frère malheureux, éprouvé par la schizophrénie. Ici se révèlent, avec une indicible pudeur, les moments forts d'une relation fraternelle marquée par la peine, la solitude et l'inquiétude, mais sans cesse raffermie par la tendresse, la sollicitude. "À ce moment je me suis dit pour la première fois qu'il ressemblait, avec ses cheveux courts aux vifs reflets mordorés, à ce petit oiseau délicat, le roitelet, dont le dessus de la tête est éclaboussé d'une tache jaune. Oui, c'est ça : mon frère devenait peu à peu un roitelet, un oiseau fragile dont l'or et la lumière de l'esprit s'échappaient par le haut de la tête. Je me souvenais aussi que le mot roitelet désignait un roi au pouvoir très faible, voire nul, régnant sur un pays sans prestige, un pays de songes et de chimères, pourrait-on dire."
"" Depuis le début, j'ai été prise dans une tension, un déchirement même, entre la langue littéraire, celle que j'ai étudiée, aimée, et la langue d'origine, la langue de la maison de mes parents, la langue des dominés, celle dont j'ai eu honte ensuite mais qui restera toujours en moi-même. Tout au fond, la question est : comment, en écrivant, ne pas trahir le monde dont je suis issue ? » Ainsi Annie Ernaux évoque-t-elle son travail d'écriture dans cette conférence célèbre qu'elle a prononcée à Yvetot, en 2012, lors de sa rencontre officielle avec les habitants de la ville. Cette nouvelle édition 2022 de Retour à Yvetot, texte fondateur et éclairant sur la vie et l'Å«uvre de la célèbre écrivaine, est augmentée de plusieurs inédits confiés par l'autrice : photos personnelles, correspondance avec son amie de collège Marie-Claude jusqu'à ses 22 ans, extrait manuscrit de son journal intime de l'époque, carnet scolaire.
Il est mort jeune, à quarante-cinq ans, mais il laisse une oeuvre considérable, labyrinthique, construite comme autant d'expériences d'écriture. Une vie anéantie à peine commencée - père tué en 1940, mère disparue à Auschwitz. Pas de souvenirs d'enfance. De cette amnésie, Georges Perec fera le ressort de sa création littéraire : il ne cesse de chercher à retisser des liens et des repères par les lettres, le jeu, l'invention narrative. Son oeuvre trace des chemins obliques pour lire le monde et son histoire. La vie de cet homme qui s'est reconstruit grâce à sa passion des mots s'entrevoit essentiellement à l'ombre et à la lumière de ses livres.C'est en les lisant que Claude Burgelin s'efforce de retrouver la trame d'une vie et les secrets d'un imaginaire qui continue à fasciner par son charme indicible et ce qu'il conserve d'énigmatique. Il accompagne une enfance cassée avant d'être recréée par les ressources de l'intelligence. Esquisse le portrait d'un jeune homme déterminé à affronter l'existence en écrivant. Dessine un Perec partagé entre le travail de bureau et l'artisanat de l'écriture, expérimentateur de l'art d'écrire et de dire, paysan de Paris à la recherche de «l'infra-ordinaire», présent-absent de sa judéité qu'il revisite à Ellis Island, homme d'amitiés et de grands rires. Il vivra entouré d'une seule vraie parenté, tôt retrouvée auprès de certains auteurs, la famille de cet enfant de la littérature, qui a su devenir, par un infatigable labeur, un écrivain singulièrement heureux.
Éditeur de Samuel Beckett et de J.M.G. Le Clézio, Georges Lambrichs fut l'un des grands animateurs de la vie littéraire de la seconde partie du XX? siècle. Né en Belgique en 1917, entré en contact avec La NRF dès les années 1930, il devient en 1942 le correspondant à Bruxelles de la revue littéraire clandestine Messages. Proche de Vercors, il officie comme lecteur aux Éditions de Minuit à la Libération, avant d'en prendre la direction littéraire. Auprès de Jérôme Lindon, il édite Samuel Beckett, Georges Bataille, Maurice Blanchot, Marguerite Duras, Alain Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute et Michel Butor. C'est le temps du «nouveau roman», mais c'est aussi celui d'un lien très fort entre la NRF et Minuit, soutenu par l'amitié avec Jean Paulhan.Entré aux Éditions Gallimard en 1959, Georges Lambrichs y orchestre l'émergence d'une nouvelle génération d'écrivains et de critiques. Pleinement dévoué à la littérature de création, il accueille dans la collection «Le Chemin» et sa revue attenante, Les Cahiers du Chemin, Georges Perros, Jean Starobinski, Michel Chaillou, Jacques Réda, Henri Meschonnic, Pierre Guyotat, Gérard Macé, Jean-Marie Laclavetine et, dès 1962, J.M.G. Le Clézio.Le Chemin continue retrace un parcours éditorial d'exception.
Lorsqu'elle disparaît en 1990, Delphine Seyrig n'est plus cette figure de proue du cinéma d'auteur mondial qu'elle fut durant toutes les années 60 et 70, de Marienbad au Charme discret de la bourgeoisie.
Les années 80 ne l'ont pas aimée ; dans cette décennie de restauration formelle et idéologique, son parcours, esthétique ou politique, paraissait trop radical. C'est peu dire que le temps a joué en sa faveur. La postérité a validé ses choix d'actrices les plus aventureux (chez Akerman ou Duras). Son oeuvre de cinéaste est redécouverte avec un intérêt croissant. Ses prises de position publiques, aux avant-postes de la lutte féministe, circulent plus que jamais sur les réseaux.
Quelles traces de son court passage laisse l'astre Seyrig ?
Tel sera l'objet de cet essai admiratif et amoureux.
Et pourtant, au milieu des tourments et des affres, dans la vase et dans la boue de la vie concentrationnaire, la liberté était la lumière et la force des âmes captives. La liberté était immortelle.
Après trois décennies dans les goulags, Ivan Grigoriévitch retourne au monde des hommes. Au cours d'un voyage en Russie poststalinienne, de Moscou à sa terre natale, l'ancien prisonnier affrontera non seulement son propre passé mais aussi celui de l'Union soviétique et de tout un peuple.
Ivan croise le chemin de paysans, de soldats, de proches et d'inconnus qui, chacun à leur tour, abordent des moments tendres ou tragiques de leur histoire.
De la guerre civile à la famine rouge, des politiques de répression de Lénine à la Shoah, Ivan dénonce ce qu'il perçoit comme l'asservissement de ses compatriotes et les abus de pouvoir des instances soviétiques.
Tout passe, le dernier roman de Vassili Grossman, représente le testament littéraire et politique d'un auteur incontournable dont la vision puissante de la liberté résonne encore aujourd'hui.
Ici, le courage est contagieux, comme peut l'être ailleurs la lâcheté. On vit d'une heure à l'autre, d'une minute à l'autre, parole d'honneur. On attend l'aube.Correspondant de guerre pour l'Armée rouge pendant la Seconde Guerre mondiale, Vassili Grossman est sur tous les fronts : Stalingrad, la libération des camps de la mort en Pologne, la chute de Berlin. Dans le même temps, il relate dans ses carnets ce qu'il appelle « la vérité impitoyable de la guerre » au travers d'anecdotes et de comportements saisis sur le vif, avec toujours un regard empreint d'humanité.Ses écrits personnels, par leur liberté de ton, diffèrent sensiblement de ses dépêches officielles et auraient pu avoir de lourdes conséquences pour lui s'ils avaient été découverts. Antony Beevor nous en propose des extraits accompagnés d'indications précieuses sur le déroulement du conflit, le contexte politique et le cheminement personnel de Vassili Grossman, ex-communiste désenchanté, juif athée et, avant tout, immense écrivain.
L'histoire fascinante et tragique de la survie de la première expédition en Antarctique à la fin du 19e siècle, à bord d'un navire belge, la Belgica, pris au piège dans les glaces. Sous la houlette du jeune explorateur Roald Amundsen comme officier en second et du médecin expérimental Frederick Albert Cook, l'équipage endurera pendant presque un an les longues nuits noires de l'hiver antarctique avant de rentrer à bon port. Un huis-clos habilement mené, qui tient du polar.
«Il s'efforçait de rire.Et eux aussi riaient, ne se doutant pas un seul instant du gouffre que cache parfois le rire d'un père.»Syrie. Un vieil homme rame à bord d'une barque, seul au milieu d'une immense étendue d'eau. En dessous de lui, sa maison d'enfance, engloutie par le lac artificiel el-Assad en 1973.Fermant les yeux sur la guerre qui gronde, muni d'un masque et d'un tuba, il plonge - et c'est sa vie entière qu'il revoit, ses enfants au temps où ils n'étaient pas encore partis se battre, Sarah, sa femme folle amoureuse de poésie, la prison, son premier amour, sa soif de liberté.