L'altitude est pour moiL'autre nom de l'amourAvec à l'infiniL'aube de la vraie vie
Nouvelle édition augmentée
Publier un troisième volume d'André Velter en "Poésie /Gallimard" était assurément nécessaire, ne serait-ce que pour signifier la place majeure qu'occupe son oeuvre dans la poésie des dernières décennies, place première sans doute dans la génération qui suit celle des Bonnefoy, Jaccottet , Roubaud ou Dupin. Les trois titres des années 2000 rassemblés ici, suivant le triptyque de la douleur et de l'amour que constituèrent les poèmes à Chantal Mauduit, développent et approfondissent le credo existentiel du poète dont ce vers de La vie en dansant dit tout:"Du mouvement il n'y a pas à démordre". Il s'agit encore et toujours pour Velter d'échapper à toutes les ankyloses, tous les renoncements et toutes les clôtures et de se donner à cet absolu qu'est l'élan vertical et sans fin de la vie, cette danse sur l'abîme. La poétique de Velter, immédiatement reconnaissable entre toutes, est à l'aune de cette ardeur et de ce courage, toute de rythmes et de souffle vigoureux, scansion d'une âme enfiévrée qui exhausse la parole jusqu'au chant. Jamais tournée vers elle-même, chambre d'échos multiples, cette poésie de pleine santé s'imposait d'autre part pour accompagner le prochain Printemps des poètes dédié au Courage.LES DRAPS BLEUSTout est là qui attendLe signe altier d'un gant dans l'ombreLa caresse du ventEt ces toits qui descendent en miroirs vers la mer Nous ne serons jamais à quaiOu pour une escale très brèveQuelques instants sur quoi fermer les yeuxAvant de repartir accordésDu sel aux coins des lèvres Le temps qui s'est levéEntre les draps bleus d'un lit du RajasthanN'est pas de ceux qui passentIl appartient au présent chaviréTriomphant des naufrages et des peurs Les questions peuvent rester divinement sans réponseEt se transporter ailleursAvec une sorte d'allégresse neuveUne ferveur qui parle aux étoiles en plein jour Je me sens l'âme à la verticaleEt tout est là qui n'attend pas.
«Il m'appartient désormais, par la seule force de mon amour, et pour disputer à la mort les noces qu'elle nous a volées, d'escorter ta course vers les autres sommets.» Ce volume regroupe les «poèmes pour Chantal Mauduit».
L'Arbre-Seul, que les chrétiens appelaient l'Arbre-Sec, se dressait aux dires des légendes au bord du monde connu, quelque part du côté du Khorassan. Cet épouvantail du désert marquait la limite des terres autorisées. Au-delà s'ouvraient les espaces interdits, maudits, impensables parce que volontairement soustraits au champ de la pensée, de l'errance et du songe.Le poème a pris l'Arbre pour repère, pour aimant. Comme s'il s'agissait d'un appel à forcer le passage, d'un signe à inverser. Et du voyage en Orient aux multiples départs, le corps et l'esprit ne sont jamais tout à fait revenus. L'Afghanistan, l'Inde, l'Himalaya, la Route si ravagée de la Soie ont ravivé le mystère et l'exaltation d'être, ici ou à mille lieues, si intensément présent.L'Arbre-Seul est le poème des deux versants du monde, avec miroirs de lumière et d'ombre, souffles de sable, poussières d'éternité, fureurs, jubilations et «paroles ailées». C'est un ample parcours à suivre comme une partition polyphonique, comme une improvisation aux rythmes divers, parfois contraires, et qui compose au sens fort un livre de poésie, qu'Alain Borer tient pour «le plus tonique depuis Alcools d'Apollinaire».
Le temps de la poésie n'est pas celui des horloges ni de la mesure commune. Aussi l'intitulé de ce livre, en forme d'injonction sidérale, m'a-t-il été offert par un copain taoïste qui trinquait joyeusement un soir de pleine lune à une encablure de l'An mille... Séduire l'univers !Mais sur le chemin des étoiles et des exoplanètes une pandémie incurablement terrestre est venue assujettir nos destinées, imposant une réplique immédiate, un grand sursaut, une salve de poèmes jetés d'emblée À contre-peur.A.V.
Comme l'oiseleur du temps Je capture au matin Les paroles qui ont encore des ailes Avant de les libérer aussitôt Pour qu'elles s'en aillent messagères Par le champ des nébuleuses Où Guillaume Apollinaire N'en finit pas de rêver À ce réel sans limite Qui mène plus loin que les rêves
«Peut-on jouer l'espace contre le temps ? S'inventer un univers moins balisé, moins ressassé, et contrer des saisons sans cesse plus meurtrières ? C'est le pari de ce livre pareil à un voyage qui partirait partout et n'en reviendrait pas. Errance qui décalerait les méridiens, les habitudes, les pensées, les vies toujours à l'heure, qui changerait le tournis du monde en danse de derviche, avec frénésie et ferveur, vertige et jubilation, dans le sillage ou le souvenir de villes traversées, d'océans et de déserts franchis comme autant de zones d'insomnie.Au Cabaret de l'éphémère, il fait bon être présent au présent, aimer l'amour infiniment, bivouaquer dans la résonance active des quatrains d'Omar Khayyam, mais en improvisant une poésie au long cours qui entend tenir parole.»André Velter.
«Là-haut, tu es. Là-haut quoi qu'il advienne,femme-soleil d'un miracle à jamaisque rien ne sépare de la pure lumièreni du souffle ascendant de notre amour promisà une autre altitude. Tu es là, hors d'atteinte,hors du monde où meurent les âmes et les corps.Tu danses sur l'horizon que je porte en moipour abolir l'espace et le temps. Tu vis à l'infini.»André Velter.
« Ton texte à la main, je l'entrouvre, divine surprise ! Ainsi, près de cent ans après Saint-John Perse, une nouvelle Anabase, la tienne ! Et d'emblée, je suis saisi par le cri : À nous deux l'infini !
[.] Certes, tu n'ignorais pas les frontières, mais tu entendais résolument les transcender. Ton imaginaire s'est affronté au réel, s'est nourri du réel. En cela, tu es proche aussi de Segalen.
Tu as même accompli son rêve : atteindre le mythique Tibet. [.] Il en résulte un haut chant, passionné et passionnant, sur un ton de défi, d'apostrophe, d'exclamation, et finalement, de célébration de tout ce qu'il nous est donné d'ouvert, ici et maintenant.
À la différence de Gengis, tu n'as point d'empire à établir. Tu vises le contraire, en affirmant que pour des dépeupleurs de notre sorte, il n'y avait pas plus bel empire que le déraciné, le vague, le non-revendiqué. [.] Être poète de plein droit, voilà le mot d'ordre, voilà la conquête.
Mais une poésie qui n'est plus issue du salon calfeutré, de l'arrière-salle enfumée. [.] Tu fais partie désormais de la glorieuse lignée des poètes français qui ont hanté, chacun à sa manière, en ce monde, le plus lointain royaume d'où l'on ait à répondre - la Chine. » (François Cheng) Après Segalen, Claudel, Michaux et Saint-John Perse, André Velter revisite l'épopée chinoise à travers ce long poème en prose, plus qu'un clin d'oeil à l'auteur d'Anabase, une marque d'admiration. Comme chez son modèle et inspirateur, il s'agit d'une épopée qui chante les déserts de Gobi et de Taklamakan, la conquête des cimes, le repos de bivouacs, le calme des oasis. Cette poésie vient des grands espaces, elle exalte l'errance, le déracinement, le nonrevendiqué.
« De Bénarès à Bagdad, de Séville à Surabaya, de Charleville à Chengdu, de Kaboul à Kathmandou, de Louxor à Lhassa, de Makassar à Malacca, d'Islamabad à Jérusalem, de Delhi à Doha, de Paris à partout, la route semble sans fin quand le voyage est devenu l'aimant de la vraie vie. Ce n'est pas là courir le monde, mais choisir un destin sans balise ni appartenance. Frontières abolies, révoltes revivifiées, émerveillements partagés, on voit ainsi midi à toutes les portes, tout en expérimentant joyeusement le kôan zen : À esprit libre, univers libre ! Car c'est toujours l'heure de partir à l'aplomb du soleil, droit devant, n'importe où, avec l'ardent désir de s'en aller trafiquer dans l'inconnu. » André Velter.
Livre-récital composé dans la résonance des musiques de Pedro Soler, Tant de soleils dans le sang exalte l'énergie qui court le monde, qui prend ses risques et ne cesse de reprendre souffle. Ici, des mots jetés sur les cordes d'une guitare flamenca entendent faire chants et sens à la fois. Ce sont des mots pour repartir et se retrouver à jamais en terrain découvert, avec des dessins d'Ernest Pignon-Ernest à placarder dans les rues.
D'UN RYTHME DE FEU ET DE LARMES NOUS AVONS SECOUÉ LE SABLIER DU CIEL RAVIVÉ L'ÉCORCE DE LA TERRE MIS LE DESTIN AU GALOP ET SANS DOUTE EN DÉROUTE
Paseo Grande, comme un pari fabuleux et fatal, sans fausseté ni repli possibles.
Paseo Grande, comme un périple dans les périls où se réinvente le monde. Paseo Grande, comme un récital amorcé dans l'incessant va-et-vient de textes encore précaires et de mélodies soudaines. Ce livre est indissociable du mouvement complice qui l'a suscité et de l'environnement sonore, vocal et musical qui l'a inspiré. Les compositions et le chant d'Olivier Deck ont accompagné et parfois devancé l'écriture de ces ballades pareilles à des rêves éveillés, à des sursauts funestes, à des éclats de vie violente et fière.
C'est pourquoi un tel recueil se devait, en plus d'être imprimé, de s'affranchir de son cadre et d'offrir, par une extension désormais possible du côté d'internet, quelques propositions d'écoute, quelques séquences filmées. S'aventurer ainsi en terrain découvert suggérait de s'adjoindre plusieurs talismans, aussi aléatoires que ceux qu'énumère Borges dans La rosa profunda, et les sept quatrains en images, réalisés avec Antonio Segui, ne comptent d'ailleurs que sur leur magie hasardeuse, explicitement ironique, pour assurer la protection rapprochée du Paseo Grande.
«Sur la peau d'un monde rétréci, livré aux lois sinistres des sédentaires, l'aventure Zingaro s'impose comme un défi exaltant, fabuleux, irréductible aux nouvelles normes planétaires. Ici, une tribu venue de nulle part s'est choisi aussi bien ses ancêtres que ses rites, ses légendes que son mode de vie, avec pour seule mystique et seul viatique l'amour des chevaux. Ce parcours de rupture radicale, j'ai tenu à l'escorter et à le célébrer, tant la poésie vécue est indissociable pour moi d'un engagement physique, éthique et esthétique:précisément ce qui est à l'oeuvre chez Zingaro et dans toutes les créations personnelles de Bartabas. Rythmé par des dessins d'Ernest Pignon-Ernest, ce livre en expansion constante se veut un témoignage d'indéfectible complicité et d'amitié fervente, mais il tire sa légitimité d'une admiration attentive, scrupuleuse, alertée, sans cesse revivifiée. Je tiens en effet Bartabas, toutes catégories artistiques confondues, pour le plus grand créateur de ce temps.» André Velter.
«Dans l'Himalaya, tu as gravi six des plus hautes montagnes du monde : le Chogori ou K2 (8 611 mètres), le Shisha Pangma (8 046 mètres), le Cho Oyu (8 201 mètres), le Lhotse (8 516 mètres), le Manaslu (8 163 mètres), le Gasherbrum II (8 035 mètres).Il m'appartient désormais, par la seule force de mon amour, et pour disputer à la mort les noces qu'elle nous a volées, d'escorter ta course vers les autres sommets.»
Le titre est un refrain retenu de travers. Jamais le Chant des canons de L'Opéra de quat'sous n'a conduit les troupiers «du Gange à Zanzibar», mais «du Cap à Couch Behar». Cette erreur d'aiguillage ne relève pas pourtant du seul hasard : le premier repère est familier à l'auteur, le second apparaît fréquemment dans les lettres de Rimbaud comme autre dénomination de l'ailleurs. Du Gange à Zanzibar est le poème de la présence au monde et aux êtres, poème du mouvement et des migrations sans fin, avec jubilations et déchirements, visions, éclats de rire, commotions, lumière. Il est escorte de ce qui vit, viatique de ce qui passe.
«Un pas toujours plus haut Dans cette approche impossible Qui passe de l'effroi à l'extase Comme d'un réel à l'autre D'une lumière à l'autre D'un univers à l'autre Et pour le même amour» André Velter.
« La poésie trouve ici une unité de lieu : l'altitude. Celle du Tibet et de l'Himalaya. celle de ce Toit du Monde qui ne recouvre rien mais donne sur le ciel dans une autre lumière. Le Haut-Pays esy le troisième pôle de la terre : là où les boussoles s'essoufflent et perdent leurs repères, là où s'ébauche un réel aimanté.
Ce qui s'éprouve alors, c'est l'expérience du lointain et du proche, de l'infini, de l'infime, de la plénitude et du manque. Il y a tout ensemble le jeu des muscles, l'ivresse des visions, le silence, la solitude, la montée des mots ou des chants. Il y a aussi comme une traque fervente qui s'exalte, s'irrite, s'émerveille de son propre mouvement.
Il va sans dire que ce parcours n'est pas celui d'un dévot. La rencontre avec le bouddhisme tibétain intervient d'abord et tout naturellement dans le sens de la marche : c'est une approche physique, pas un acte de piété, même si la traversée du Tsangpo mène à Samyé, le monastère des origines.
Poème et polyphonie à la suite, ce livre n'accueille en effet que des ascèses toniques où le corps est en fête et l'esprit des plus libres. »
André Velter.
De Séville aux montagnes et déserts de la Haute Asie, ce livre-récital est une migration qui va à l'aventure, même en pays connu, avec pour écho et escorte les improvisations du violoncelle de Gaspar Claus. Parcours de mémoire vive, Jusqu'au bout de la route restitue les villes, les bivouacs, les ermitages, et les êtres aimés, dans une irréductible lumière de soleil levant :
« Ici ailleurs partout La vie d'énergie fauve De féria téméraire Dans un raid amorcé Sous un ciel andalou Pour trouver en dansant La formule et le lieu Du dernier horizon » Poète, essayiste, André Velter se veut surtout voyageur. Né en 1945 dans les Ardennes, il s'est beaucoup attaché à courir le monde, avec une prédilection marquée pour l'Orient.
Dans le champ poétique, il s'est toujours tenu du côté de ceux qui ne conçoivent de poésie qu'intensément vécue. Il a publié aux Éditions Gallimard Aisha (avec Serge Sautreau), L'Arbre- Seul, Le Haut-Pays, Du Gange à Zanzibar, Zingaro suite équestre, La vie en dansant, L'amour extrême, Au Cabaret de l'éphémère, Midi à toutes les portes, Extases (avec Ernest Pignon- Ernest), Paseo Grande, Avec un peu plus de ciel, Prendre feu (avec Zéno Bianu) D'André Velter paraissent simultanément Tant de soleils dans le sang (collection blanche) et Ernest Pignon-Ernest (Livres d'Art).
Dans l'avenir à découvert Comme dans une larme de feu Où rien ne va à la cendre Où rien ne va au remords On comprend qu'il y a de l'or Qui règne sous la peau Et une vague violente qui n'espérait que ça.
A V.
«En poche, je garde sous le poing un mémento qui est moins qu'un viatique et à peine un pense-bête. Il dit : La poésie ne peut être coupée ni du sacré ni du réel. Elle n'est pas un réservoir de mots d'ordre. Elle a du souffle et pas de frontières. Sa langue lui appartient, mais elle appartient à la rumeur des langues. Opaque à tout populisme, elle n'a pas à craindre d'être populaire. Si elle est vécue, elle change la vie.» André Velter.
« Où que l'on soit, au Ladakh, à Istanbul, à Mexico, à Badajoz, au Mont Athos, à Bénarès ou dans les îles de la Sonde, la règle est de voyager léger. Pas question d'emporter papier à lettres et enveloppes au fond d'un sac à dos. La carte postale achetée en bord de route comme au coin d'une rue devient la solution idéale. Rédigée sur le champ (bazar, bus stand, trottoir, tea stall, bivouac), et expédiée séance tenante. [.]En fait, le recours aux cartes postales était des plus épisodiques et ne devait devenir fréquent que quelques années plus tard, au bénéfice exclusif de mon ami Yanny Hureaux, qui pouvait ainsi me suivre à saute frontière depuis sa clairière ardennaise de Gespunsart. Sans qu'il le sache, j'usai de son prénom pour ajouter à mes jeux d'écriture un nouvel atout littéraire d'un genre désormais spécifique et immuable : la carte à Yanny. À partir de 2002, l'année qui vit la mort rapprochée de mes parents, dont il avait été le visiteur attentionné et le soutien le plus fidèle, les envois devinrent systématiques. Dès que je quittais l'hexagone, fût-ce pour un jour, une semaine ou quelques mois, je ne dérogeais jamais à cette habitude, qui n'avait rien d'une contrainte, tout juste d'un réflexe fraternel. » (André Velter)L'originalité du Jeu du monde réside en sa forme : une série de cartes postales envoyées des quatre coins du monde par André Velter à son ami Yanny, coincé dans l'Hexagone pour cause de handicap. Ces courts textes vont de la pure impression à la méditation en passant par de véritables poèmes en prose. Le lecteur a la sensation d'ouvrir un herbier littéraire et géographique. En quelques lignes nous sommes à Pékin, on tourne la page et nous voilà à Izmir. On ne résiste pas à ce monde en raccourci.Du même auteur, à paraître simultanément : Loin de nos bases (collection blanche)