Première véritable incursion de Dada dans le domaine du récit, L'Autruche aux yeux clos porte une magnifique exigence libertaire qui n'épargne rien, et surtout pas les conventions du genre : courses autour du monde, faux exotisme, poursuites amoureuses à la conclusion sans cesse différée, action improbable imprégnée d'humour noir.
Ce volume rassemble trois pièces sauvages de l'auteur désigné par André Breton comme l'un des seuls "vrais dadas" : L'Empereur de Chine (1916), The Mute Canary (1920) et Le bourreau du Pérou ( 1928). Les deux premiers sont depuis longtemps reconnus comme des moments forts dans la contribution du mouvement Dada au théâtre, mais ces pièces font également écho au travail d'autres surréalistes dissidents de l'époque, tels Georges Bataille et André Masson. Ces oeuvres théâtrales troublantes étaient des anticipations significatives du théâtre de la cruauté et du théâtre de l'absurde d'Antonin Artaud des années 1960.
Dans ce livre incroyable, Picabia se moque de tout, y dézingue tout. S'il y met à mal les idées, les sentiments, les principes, les conventions, déconstruit la réalité, rit de tout et de rien, et même de lui, c'est que jouer c'est vivre, autant que aimer ou travailler. Un véritable livre de chevet impertinent, construit de fulgurances poétiques teintées de dérision, profondément imbibées de nihilisme qui dérangent autant qu'elles amusent. Sans aucun doute le grand texte de Dada à Paris et le chef-d'oeuvre littéraire de Picabia, dont il est à l'image : brillant, scandaleux, provocateur, désinvolte. Ridiculisant l'art et les artistes, la littérature et les écrivains, les bourgeois et les poètes, rejetant toute forme d'autorité, Jésus-Christ Rastaquouère est exemplaire de l'esprit du moment.
Arbresarbreschevaux sauvages et sagesà la crinière verteau grand galop discretdans le vent vous piaffezdebout dans le soleil vous dormezet rêvez