La capacité qu'ont les capitalistes de s'enrichir ou de nuire au bien commun ne tient qu'à un ... code ! Car, en soi, la possession d'une terre, d'un atelier, d'une idée, etc., ne procure qu'un outil. Celui-ci ne devient une source durable de richesse et de pouvoir opposable à autrui qu'en raison des droits et protections que lui confère son codage juridique. Dans une langue accessible à tous, Katharina Pistor, nous explique la fabrique du capital. Elle raconte l'histoire de l'adaptation du droit pour instituer successivement le codage capitaliste de la terre, de l'entreprise, de la connaissance, de la dette, de la nature. Elle met au jour le rôle des « maîtres privés du code » - ces avocats et banquiers qui élaborent de fait le code public en inventant des contrats et des instruments qu'ils font ensuite valider par la loi. Ce droit conçu par et dans l'intérêt de riches acteurs privés induit à la fois l'accumulation de richesse, l'envol des inégalités et les crises à répétition. Mais, puisque que c'est la loi qui fait le pouvoir du capital, l'auteure peut esquisser la manière de concevoir un autre code qui remettrait le droit des entreprises, des marchés et de la finance au service de l'intérêt commun.
Le discours politiquement correct a installé l'idée que la " mondialisation " libérale (par la libéralisation des échanges et de la finance) était un " phénomène " quasi naturel dessinant le prochain cadre universel et éternel où se poursuivrait l'histoire de l'humanité. Cette " mondialisation " - que dans le reste du monde on dénomme " globalisation " - n'est en fait qu'un moment de l'histoire construit par une série de choix politiques inaugurée en 1973, avec l'abandon du système monétaire international de Bretton-Woods (1944). Et ce moment est en train de s'achever !Loin d'avoir dispensé les prétendus bienfaits des " marchés libres ", la globalisation en a manifesté la nocivité en plongeant les nations dans de multiples impasses économiques, écologiques, sociales et géopolitiques. Les pays émergents qui en tirent le plus grand profit, notamment en Asie, sont ceux qui déploient des stratégies de développement national en rejetant la " loi du marché ", tout en profitant de la soumission volontaire ou forcée des autres pays à cette même loi. Ces deux évidences conduisent vers une déglobalisation inéluctable, chaque pays ayant un intérêt manifeste à déployer des stratégies nationales et à se prémunir contre les effets destructeurs de la libéralisation financière et du libre-échange. À défaut d'être pensée, cette déglobalisation peut se faire dans le désordre et l'affrontement des nationalismes. C'est à conjurer cette perspective que s'attache l'auteur en dessinant une déglobalisation articulée sur une nouvelle organisation du commerce international et de la finance internationale.
L'injonction paradoxale plonge un individu dans un dilemme insoluble en lui imposant des objectifs qui sont incompatibles : produire toujours plus avec moins de moyens, avoir l'esprit d'équipe quand on individualise l'évaluation du travail, etc. La mutation vers un capitalisme financiarisé engendre l'invasion de cette logique paradoxante, non seulement dans les grandes firmes, mais aussi dans des PME, des entreprises publiques et des administrations.
Les auteurs expliquent les origines du phénomène (révolution numérique, financiarisation du capitalisme), avant de passer en revue toutes les dimensions de la révolution managériale qui s'est ensuivie (lean management, flux tendus, évaluation des performances, etc.). Grâce à leurs enquêtes menées en entreprise, ils poursuivent en analysant la difficulté de vivre dans une organisation paradoxante aux effets ravageurs pour la santé (stress, burn out, dépression). Leur diagnostic sur les méthodes défensives déployées par les salariés est inquiétant : une adaptation réussie (qui diminue la souffrance) contribue aussi à entretenir le système en anesthésiant la résistance. Ils proposent des pistes pour une résistance susceptible d'inspirer les managers soucieux de sortir d'un système qui se retourne contre les intérêts à long terme des entreprises.
Vincent de Gaulejac, directeur du Laboratoire de changement social et professeur de sociologie à l'université Paris-VII, auteur d'une quinzaine d'ouvrages, préside le Comité de recherche de sociologie clinique à l'Association internationale de sociologie.
Fabienne Hanique, chercheur au Laboratoire de changement social et maître de conférences de sociologie à l'université Paris-VII, a notamment publié Le Sens du travail (Érès) et codirigé La sociologie clinique : Enjeux théoriques et méthodologiques (Érès)
Sous une apparence pragmatique, la gestion constitue une idéologie qui légitime la guerre économique et l'obsession du rendement financier. Les ' gestionnaires ' installent en fait un nouveau pouvoir managérial. Il s'agit moins d'un pouvoir autoritaire et hiérarchique que d'une incitation à l'investissement illimité de soi dans le travail pour tenter de satisfaire ses penchants narcissiques et ses besoins de reconnaissance. Il s'agit d'instiller dans les esprits une représentation du monde et de la personne humaine, en sorte que la seule voie de réalisation de soi consiste à se jeter à corps perdu dans la ' lutte des places ' et la course à la productivité.
Or, pour comme pour mieux assurer son emprise, cette logique déborde hors du champ de l'entreprise et colonise toute la société. Aujourd'hui, tout se gère, les villes, les administrations, les institutions, mais également la famille, les relations amoureuses, la sexualité... Le Moi de chaque individu est devenu un capital qu'il doit faire fructifier.
Mais cette culture de la haute performance et le climat de compétition généralisée mettent le monde sous pression. Le harcèlement se banalise, entraînant l'épuisement professionnel, le stress et la souffrance au travail. La société n'est plus qu'un marché, un champ de bataille insensé où le remède proposé aux méfaits de la guerre économique consiste toujours à durcir la lutte. Face à ces transformations, la politique, à son tour contaminée par le ' réalisme gestionnaire', semble impuissante à dessiner les contours d'une société harmonieuse, soucieuse du bien commun.
Peut-on néanmoins échapper à l'épidémie ? Peut-on repenser la gestion comme l'instrument d'organisation et de construction d'un monde commun où le lien importe plus que le bien ? C'est en tout cas la piste qu'ouvre ici le diagnostic du sociologue clinicien.
La " valeur travail " est ébranlée. Jadis et tout à la fois source d'accomplissement personnel, d'estime de soi, de liens sociaux et de reconnaissance sociale, le travail est de plus en plus souvent vécu comme une peine quotidienne exposant l'individu à l'isolement, à l'angoisse de n'être plus " à la hauteur ", au stress de la compétition, à l'humiliation publique, à la souffrance psychique qui pousse certains jusqu'au suicide. Bien des rapports ont exploré ces phénomènes en privilégiant tantôt leur dimension sociale, tantôt ses causes économiques et politiques, ou encore sa dimension individuelle et psychologique. L'auteur mêle ici le psychique, le social, l'économique ; il décrypte l'interaction complexe de toutes ces causes et propose une grille de lecture qui fonde une résistance à la déshumanisation du travail. C'est bien un système managérial pensé au service exclusif de la performance financière, et non la fragilité singulière des individus, qui est en train de transformer le travail en torture et d'étendre au secteur public les méfaits d'une gestion inhumaine d'abord rodée dans le secteur privé. Identifier l'origine du mal donne ici les " raisons " de la colère des travailleurs en un double sens, comme explication de ses sources, mais aussi comme première protection de ses victimes : résister, exprimer et manifester la légitime colère contre un système inhumain est désormais la plus raisonnable des réactions, pour éviter que les individus retournent contre eux-mêmes une violence nourrie par ce système.
Dans les grandes organisations, tout le monde connaît le célèbre Principe de Peter : " Chaque employé tend vers son plus haut niveau d'incompétence. " Le principe exposé dans ce livre - sans doute promis au même succès, et surtout plus essentiel est le Principe de Mauss, du nom du fondateur de l'anthropologie française et auteur du fameux Essai sur le don - peut se formuler ainsi : " Sans don, il n'est pas d'efficience possible. " Il rappelle la fable de la poule aux oeufs d'or : on " perd tout en voulant tout gagner ". Ce principe va révolutionner le paradigme du management.
Car - nous démontrent les deux auteurs - les organisations qui fonctionnent bien (entreprises, associations, administrations, équipes sportives etc.) sont celles qui savent respecter la logique et la dynamique des quatre temps du don et contre-don : demander - donner - recevoir - rendre, alors que celles qui dysfonctionnent basculent dans le cycle opposé du ignorer - prendre - refuser - garder. Le bon manager, le bon entraîneur, le bon animateur... reconnaît dans le cycle du don la véritable source de l'efficience, celle qui réengendre jour après jour le cercle vertueux de la coopération et du travail pris à coeur. Le mauvais manager, aveuglé par la seule obsession d'une efficacité ou d'une rentabilité immédiate, finit par tuer la poule aux oeufs d'or et enferme tout le monde dans le cercle vicieux du chacun pour soi et du découragement.
Ce livre raconte l'avènement de l'« économie comportementale », dont Richard Thaler est l'un des principaux pères fondateurs. En combinant la psychologie expérimentale et l'étude concrète des marchés, cette nouvelle discipline refonde l'analyse économique sur les comportements réels des êtres humains, et non plus sur la fiction de l'homo oeconomicus. Autrement dit, elle sape les fondements de la science officielle (mainstream) qui ne croit qu'aux marchés efficients agis par des acteurs rationnels prenant toujours la meilleure décision possible. Quarante ans de recherches ont en effet définitivement établi que les consommateurs, les entrepreneurs, les traders, les investisseurs, les chauffeurs de taxi, etc., pensent et agissent bien souvent de travers par rapport à la fiction du choix rationnel. Plutôt que de rédiger un manuel, Thaler a choisi de rendre ces découvertes accessibles à un large public, en racontant sa vie de chercheur, ses quarante années de combat contre la doxa régissant les universités américaines. Cela donne un livre vivant et plein d'humour, grâce auquel chacun comprendra mieux ses propres comportements erronés (misbehaving), certes déviants de la rationalité économique, mais qui font de nous des humains, et non pas ces extraterrestres qui peuplent les manuels d'économie. Thaler nous dévoile aussi comment la compréhension de nos modes de raisonnement réels peut nous aider à prendre de meilleures décisions dans notre vie personnelle, dans la gestion des affaires économiques ou dans la conduite des politiques publiques.
Galbraith fait une revue critique des grilles de lecture de la crise ; il explique pourquoi tant d'économistes ne l'ont pas anticipée et restent impuissants à comprendre sa nature. Il montre comment la droite et la gauche sociale-libérale sont également incapables d'en sortir. Des gouvernements de tous bords se fourvoient et aggravent la crise en optant pour la baisse des coûts salariaux et des dépenses publiques. Mais les keynésiens de gauche se trompent aussi quand ils espèrent restaurer la croissance et le plein-emploi par une relance de la demande. S'ils ont raison de rejeter les politiques d'austérité, ils ont tort de croire au possible retour d'une forte croissance. Le coût élevé de l'énergie et la nécessité de contrer le changement climatique imposent désormais une limite structurelle à l'expansion.
Pendant trente ans, la finance spéculative et l'excès de crédit ont masqué cette réalité en nourrissant une croissance artificielle qui a débouché sur l'effondrement du système financier. En outre, la croissance crée moins d'emplois en raison des nouvelles technologies. Il nous faut donc penser une sortie de crise vers un régime durable de faible croissance, en trouvant le moyen d'assurer une activité et un revenu pour tous. Dans ce nouveau régime, il faudra notamment relever le salaire minimum, renforcer la protection sociale, réduire le temps de travail, remplacer la finance privée par un service public bancaire., bref : promouvoir tout ce que dénigre aujourd'hui le nouveau gouvernement Valls !
Cet ouvrage vient couronner une oeuvre majeure mais principalement constituée d'articles fondamentaux (parmi les plus cités dans la littérature académique). C'est le premier et le seul livre de l'auteur qui s'attache à formuler les principes et le cadre analytique d'une sociologie économique. Mais c'est plus que cela en réalité, car la façon dont procède Granovetter ne consiste pas à installer une discipline nouvelle concurrente des autres et notamment de la science économique. Il s'agit de montrer qu'aucune activité économique ne peut être comprise sans tenir compte des normes, des conventions, de la confiance, du pouvoir et des institutions sociales, et donc que l'on comprend mieux l'économie et la société en dépassant les frontières entre les disciplines. En combinant méthodes et résultats de la sociologie, l'économie, la psychologie et l'histoire, l'auteur propose un modèle interactionniste qui dépasse les clivages élémentaires (agent/système, individualisme/holisme) et il décrit les dynamiques complexes qui articulent constructions mentales et sociales, stratégies individuelles et évolution institutionnelle. En plus d'un livre de référence attendu, voilà une invitation stimulante et bienvenue à ouvrir les portes et les cerveaux dans toutes les disciplines qui traitent de questions économiques.
Sur un enjeu aussi crucial du XXIe siècle, il manquait une synthèse experte mais accessible aux non-spécialistes. Dans cet ouvrage (préparé pour la populaire et prestigieuse série « Ce que chacun doit savoir », Oxford University Press), James Galbraith décrypte la masse des connaissances disponibles pour nous livrer l'essentiel à comprendre. En moins de 250 pages, il répond successivement à toutes les questions que nous pouvons nous poser. Pourquoi faut-il se préoccuper de la montée des inégalités ? Comment a-t-on traité cette question dans l'histoire de la pensée ? Quel est l'état actuel du phénomène ? Comment mesure-t-on ce dernier ? Quelles sont ses causes, dans les pays les plus riches et dans le reste du monde ? Quelles sont ses conséquences économiques et sociales ? Enfin, Galbraith dresse le tableau des différentes politiques possibles pour réduire l'inégalité. Vivant et pédagogique, cet opus permet au citoyen, comme à l'étudiant, d'être rapidement et complètement éclairé sur toutes les dimensions d'un enjeu majeur du débat public.
Lorsqu'en 1871 Carl Menger (1840-1921) publie ses Principes d'économie politique - en quête d'une voie alternative au libre-échangisme britannique et au socialisme historique allemand -, il offre l'un des grands livres pivots dans l'histoire de la pensée, à la hauteur de La Richesse des nations (Smith), de la Théorie générale (Keynes) ou du Capital (Marx). En effet, aux côtés de Walras et de Jevons (mais bien différemment d'eux), il inaugure une économie théorique pure et engage la « révolution marginaliste » qui constitue le moment fondateur du courant dominant (et contesté) de la science économique contemporaine.
Menger pose en même temps la pierre fondatrice de l'« école autrichienne » (Böhm-Bawerk, Schumpeter, Mises, Hayek) dont la méthodologie et la philosophie individualistes imprègnent et font débat dans l'ensemble des sciences humaines et sociales.
Or cette oeuvre majeure n'était accessible ni en français ni avec les fort nombreux ajouts manuscrits que Menger apporta, jusqu'en 1910, en vue d'une nouvelle édition amplement augmentée. Vingt années durant, Gilles Campagnolo a collecté et traduit ces manuscrits dispersés à l'étranger après la mort de Menger. Son édition critique, unique au monde, est la première à restituer cette oeuvre classique au plus près du nouveau texte voulu par son auteur.
Le texte de Menger est précédé d'un historique des éditions et suivi d'un appareil critique complet. Dans la présentation éclairante qui ouvre ce volume, G. Campagnolo donne les clés pour comprendre l'oeuvre de Menger et la resituer dans son contexte historique et intellectuel.
Les défenseurs comme les critiques du capitalisme nous présentent habituellement Adam Smith comme le fondateur d'une doctrine selon laquelle la libre compétition des intérêts individuels engendrerait spontanément le maximum de bien-être collectif. Cette idée n'est pas partagée par les spécialistes de son oeuvre car elle ne résiste pas à la critique historique. Ce livre montre notamment que la pensée d'Adam Smith a peu de rapports avec le libéralisme contemporain et que, par exemple, la fameuse « main invisible » n'y désigne pas les vertus autorégulatrices du marché.
Smith est en réalité le premier auteur à proposer une analyse du capitalisme dont il découvre les trois dimensions : produit de l'histoire (la société commerciale), construction politique et intellectuelle (le système mercantile) et processus économique (l'accumulation du capital). Le capitalisme, à certaines conditions, permet l'enrichissement très inégal de tous, explique Smith, mais le système mercantile est injuste, car il est partial : il confond l'intérêt des marchands et l'intérêt général. Or, dit Smith, l'intérêt des marchands est « le plus souvent contraire » au bien commun. C'est ce que son analyse économique cherche à prouver. Le système mercantile est aussi responsable de la construction par la Grande-Bretagne d'un vaste empire colonial qui met en péril son régime constitutionnel remarquable hérité de la révolution de 1688 et qui risque de conduire à de nouvelles tyrannies. Quelles institutions permettront de tirer avantage du capitalisme en préservant la société des désastres que nourrit la logique mercantile ? Telle est la question ultime de Smith, dont l'oeuvre ainsi resituée dans son contexte originel s'avère d'une étonnante actualité.
Depuis dix ans, le monde subit les conséquences de la plus grande crise économique et financière internationale que l'on ait connue depuis près d'un siècle, une catastrophe que toute la science des facultés et tous les modèles des grands instituts de statistique et de prévision n'ont pas vue venir et n'ont toujours pas comprise. Rien d'étonnant à cette impuissance de la science économique dominante qui, depuis une trentaine d'années, a réactivé une économie pré-keynésienne qui méprise la macroéconomie, ne s'intéresse qu'aux comportements d'individus imaginaires, ne connaît que les marchés autorégulés et considère que la finance n'affecte pas vraiment le fonctionnement de l'économie !
Les auteurs entendent ici combler ce déficit béant d'explication des grands problèmes contemporains en exposant les apports du courant post-keynésien. Celui-ci n'a cessé de prolonger et de compléter les travaux de Keynes pour mieux comprendre le rôle de la finance spéculative, la mondialisation, la conduite des acteurs face à l'incertitude, les inégalités, les crises, le développement soutenable, la politique monétaire et budgétaire, le management des entreprises dans le capitalisme financiarisé... bref, pour approfondir une approche réaliste et utile de l'économie.
L'ouvrage présente les grandes figures fondatrices de cette école de pensée (Keynes, Kalecki, Robinson, Kaldor, Minsky), les fondements théoriques du système économique et de ses déséquilibres ainsi que les politiques économiques préconisées par les post-keynésiens. C'est, en langue française, la première grande synthèse d'un courant majeur de la pensée économique contemporaine.
Ce collectif est dirigé par Éric Berr (université de Bordeaux), Virginie Monvoisin (Grenoble École de management) et Jean-François Ponsot (université Grenoble-Alpes). Ils ont constitué une équipe d'enseignants-chercheurs en économie qui réunit les principaux auteurs de référence de ce courant de pensée et ses animateurs dans le monde francophone.
Les États ont épuisés leurs marges de manoeuvres en sauvant le système financier sans s'attaquer aux causes de la crise financière. Le monde reste donc à la merci d'une finance globalisée de plus en plus instable. Qu'adviendra-t-il alors quand surviendra le prochain choc systémique inévitable ? On peut craindre l'explosion sociale, le délabrement des économies, voire l'effondrement du politique. Pour proposer un remède préventif contre cette menace, il faut s'assurer d'abord du diagnostic sur les racines de la crise. Elle est due à l'essor insensé des produits financiers dérivés et aux normes de rentabilité financière imposées aux entreprises. L'onde de choc qui frappe la planète part des places financières (dont Wall Street est l'emblème) qui ont cessé de servir au financement de l'économie réelle pour n'être plus qu'un outil de pure spéculation.Pour sortir de ce dérèglement, il faut penser un monde sans Wall Street. C'est-à-dire : changer le logiciel néolibéral des économistes et des gouvernants, et remettre au coeur de la réflexion économique, la démocratie, le pluralisme des idées et des méthodes d'action. En outre, deux axes d'action se dégagent de l'ouvrage. 1°) Une réforme monétaire radicale, instituant la monnaie comme un bien commun de l'humanité et à ce titre régie par des normes politiques. 2°) Une refonte du droit des sociétés de capitaux qui retire les pleins pouvoirs aujourd'hui dévolus aux gestionnaires de capitaux, et qui partage la gestion entre toutes les parties prenantes de l'entreprise.
Trois formes de protection sociale concurrentes se sont installées dans les pays occidentaux depuis la fin du XIXe siècle. Le modèle de Bismarck apparu en Allemagne (1883) instaure des assurances sociales fondées sur une affiliation professionnelle et financée par des cotisations des salariés et des employeurs. Le modèle de Beveridge, mis en place en Grande-Bretagne (1948), instaure un système universel de santé publique financé par l'État. Enfin, les États-Unis ont développé un système mixte, sans obligation d'assurance, combinant des assurances privées et des prestations sociales publiques pour les familles défavorisées. A la fin du XXe siècle, néanmoins, l'évolution des systèmes de santé est marquée par le métissage des ces modèles. Pour en tirer les leçons utiles à la construction d'un meilleur système, l'auteur commence par une analyse économique générale des systèmes de santé, avant de procéder à une étude détaillée des fondements, des réalisations et des problèmes associés aux différents modèles nationaux (vingt-trois pays). Un bilan comparatif inédit, susceptible d'éclairer le débat public et indispensable à tous ceux, médecins, assureurs, étudiants, responsables politiques ou syndicaux, qui sont concernés par l'économie de la santé et la définition d'un système de santé optimal.
Le succès mondial du dernier livre de Thomas Piketty, qui fut l'élève d'Anthony Atkinson, a remobilisé l'attention sur le fléau que constitue l'explosion des inégalités dans les pays riches. Le diagnostic est désormais bien connu. En revanche, trop peu d'économistes s'attachent à nous expliquer comment inverser la tendance. Et tant d'autres nous désespèrent en ressassant les arguments qui donnent aux gouvernants autant de prétextes pour ne rien faire : l'intervention de l'État affaiblirait l'économie ; la mondialisation rendrait toute action impossible au niveau national ; de nouvelles mesures seraient au-dessus de nos moyens, etc. Atkinson met en pièces ces contre-vérités et propose un programme complet, concret et réalisable, même au niveau d'un seul pays.
Le problème, souligne-t-il, n'est pas seulement que les riches s'enrichissent toujours plus. Nous sommes aussi inopérants dans la lutte contre la pauvreté, car l'économie change vite, et la majorité de la population ne peut pas suivre. Pour réduire l'inégalité, nous devons faire plus que lever de nouveaux impôts sur les riches. Atkinson prescrit donc des politiques innovantes et ambitieuses dans cinq domaines : le changement technologique, la recherche du plein-emploi, la sécurité sociale, le partage du capital et la fiscalité progressive.
Dans ce texte vivant, accessible, Atkinson nous livre une somme incontournable sur le sujet et un message d'espoir dans les possibilités de l'action politique.
L'ouvrage qui vaut à polanyi une renommée mondiale (la grande transformation, paru en 1944) ne fut traduit en français qu'en 1983, signe (et cause aussi) d'une trop longue négligence pour un auteur désormais reconnu pour son apport incontestable aux sciences humaines et sociales.
Juste retour du balancier, ce relatif oublia laissé la place à une attention croissante. ce regain d'intérêt est d'autant plus fondé que la pensée de polanyi est d'une étonnante actualité. ii est en effet le penseur par excellence de la "société de marché" et de la crise à laquelle s'expose une société où la logique de l'économie marchande en vient à dominer toutes les sphères de l'activité humaine.
Actuel, polanyi l'est encore par sa conception d'un socialisme radicalement démocratique censé accomplir l'idéal moderne de liberté, par le poids qu'il accorde à la culture et aux institutions dans l'analyse des systèmes économiques, par sa méthode pluridisciplinaire et par tant d'autres traits qui en font une référence aujourd'hui incontournable dans toutes les sciences sociales. ces textes (pour la plupart inédits en français) offrent un panorama de la pensée de polanyi.
On y trouvera bien sûr des clefs pour accéder au coeur de la grille d'analyse proposée dans la grande transformation, mais aussi un outil rassemblant l'essentiel des contributions de polanyi à l'anthropologie économique, à l'étude comparée des systèmes économiques, à la philosophie politique, à l'analyse des systèmes et des idéologies qui s'affrontèrent au xxe siècle (socialisme, communisme, fascisme, nazisme).
Depuis trente ans, le culte du marché a dominé le discours politique. État modeste, impôts limités, déréglementation et libre-échange sont devenus les maîtres mots de ce dogme dont le succès fut tel qu'il a fini par faire de plus en plus d'apôtres au sein de la gauche. Or, à l'aube du XXIe siècle, nous assistons en Amérique à un drôle de chassé-croisé idéologique. Au moment où la gauche moderne a presque achevé sa conversion au marché libre, la droite conservatrice a définitivement abandonné cette idée. Galbraith montre comment, des années Reagan aux années Bush, la droite au pouvoir a transformé les États-Unis en république-entreprise où l'économie n'est pas régie par les marchés mais par une coalition de puissants lobbies industriels. Ces derniers sont soutenus par un État prédateur qui, loin de limiter l'emprise du gouvernement sur l'économie, entend bien au contraire l'approfondir pour détourner l'action et les fonds publics au profit d'intérêts privés. Si le discours officiel est resté libéral, c'est précisément pour masquer cette forme perverse d'étatisme. La nouvelle gauche libérale s'est laissé contaminer par le culte du marché libre qui n'a jamais été qu'un mythe instrumentalisé par ses promoteurs. Elle serait bien inspirée de se désintoxiquer et de comprendre enfin que les marchés n'apporteront aucune solution à la crise contemporaine, à la pauvreté, aux inégalités, à la crise écologique, tous ces défis qui appellent au contraire la planification, le contrôle public de la répartition des revenus et du financement de l'économie.
« Galbraith montre comment briser l'emprise magique des conservateurs sur les esprits de gauche. » Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie.
L'histoire monétaire et financière que la France a connue dans l'entre-deux guerres est en train de se répéter, mais, cette fois-ci, à l'échelle mondiale : un nouveau « mur de l'argent » dressé par les grandes banques internationales pour contrer la volonté des politiques. Cet ouvrage analyse l'architecture, la construction et les dangers de ce mur. Il propose tout d'abord une évaluation précise de l'emprise de la finance globale sur l'économie réelle. Des tableaux inédits, exprimés dans une nouvelle unité de mesure (le tera-dollar, soit mille
milliards de dollars), offrent une vision cohérente des flux financiers (capitaux) et des flux réels (biens et services) qui traversent désormais l'économie mondiale. Il met ensuite au jour le rôle singulier constitué par les plus grandes banques mondiales. Celles-ci ont, depuis une dizaine d'années, conquis un nouveau pouvoir par des processus rappelant le directeur sur les taux
d'intérêt, rôle autrefois dévolu à la politique monétaire des banques centrales. Par conséquent il ne
suffirait plus de replacer les banques centrales sous le contrôle du politique pour restaurer une régulation démocratique de la finance. Le vrai pouvoir de régulation monétaire à l'échelle planétaire est désormais entre les mains d'un oligopole constitué par quelques dizaines de banques internationales. Ce constat établi ici avec la plus grande rigueur est d'autant moins rassurant que
cette nouvelle régulation apolitique est loin d'être en mesure d'éviter la menace de catastrophes financières. La politique va-t-elle se redresser face au nouveau mur de l'argent ? La confrontation mondiale entre la finance globale et les citoyens aura-t-elle lieu et, si oui, sous quelle forme ? Peut-on imaginer un autre pouvoir de régulation opposable à celui de l'oligopole bancaire ? Une autre ambition de ce livre est d'ouvrir une piste de réflexion face à ces questions urgentes. Cet essai original est aussi, comme c'est souvent le cas dans la collection « Economie humaine », un livre qui permet de faire le point sur un domaine essentiel. Au fil des chapitres, on apprend ainsi l'essentiel sur le fonctionnement des marchés financiers mondialisés.
Le défi de l'éthique dans l'entreprise relève-t-il de l'angélisme, d'une bonne stratégie organisationnelle ou encore d'une nouvelle régulation du système capitaliste ? L'entreprise ne s'est jamais contentée d'un rôle strictement économique : l'histoire montre qu'elle a été au centre des mécanismes de régulation et de cohérence sociales à travers le paternalisme ou la quête d'une entreprise citoyenne. Mais désormais, la mondialisation, le désengagement de l'Etat, les nouvelles technologies, conduisent l'entreprise à prendre de nouvelles responsabilités, ne serait-ce qu'en matière environnementale. L'entreprise doit de plus en plus se soucier d'éthique. Mais est-ce compatible avec le profit ? S'agit-il d'une responsabilité individuelle ou collective ? Comment l'évaluer ? Autant de questions qui trouvent leur réponse dans l'action. L'agir éthique implique des relations basées sur la confiance. Il a de multiples aspects dans l'entreprise : ressources humaines, marketing, finance, production..., et à l'extérieur de l'entreprise, il concerne les fournisseurs, les clients, l'écologie, le chômage, le commerce international, ... Cet ouvrage passe en revue les débats théoriques et les pratiques et, à partir d'une approche historique, propose un renouvellement des questions que pose l'éthique à l'entreprise.
Bien des ouvrages ont traité des moyens de " sauver notre protection sociale ", ou au contraire d'en finir avec un modèle social archaïque... Ce livre rompt avec cette alternative simpliste entre la préservation de l'existant et la sécurité sociale minimale.
Il s'agit moins de sauver la " sécu " que de comprendre de quoi celle-ci nous sauve ! Par ces effets sur la santé, le travail, l'économie et la formation de nos jeunes, elle constitue un investissement très rentable pour notre avenir collectif. Il est donc essentiel de ne pas dégoûter les jeunes générations d'adhérer encore à la logique de solidarité collective qui assure pour tous un meilleur avenir. Or, à force de ne se préoccuper que de " sauver notre protection sociale ", on a négligé ce défaut majeur de notre système social : l'inégalité flagrante qui s'est creusée entre les générations, au détriment des jeunes. Les retraités bénéficient de dépenses sociales croissantes tandis que les jeunes sont désormais les oubliés de la protection sociale.
L'État-providence doit se muer en État social investisseur qui mobilise des moyens financiers pour investir dans la santé et la qualité du travail. Les moyens financiers pour engager cette refondation existent déjà, mais leur mobilisation suppose de rééquilibrer notre système en faveur des jeunes générations qui doivent soutenir cet investissement collectif.
Ouvrage de référence et essai sur l'ensemble des formes de production de biens privés et collectifs alternatives à l'entreprise privée et aux organisations publiques (entreprises publiques ou administrations). Ce champ d'étude comprend le « tiers secteur » (associations à but non lucratif), l'économie sociale (entreprises coopératives et mutuelles) et l'économie solidaire (entreprises d'insertion, fonds éthiques, associations d'entraide économique et sociale, etc.). Toutes ces pratiques sont issues du mouvement associatif dont l'auteur retrace ici l'histoire et les formes contemporaines de développement. Le livre conteste l'approche anglo-saxonne qui cantonne cette « autre économie » dans une sphère autonome sans incidence sur le système économique (le marché) et politique (la démocratie représentative). L'opposition entre une économie dominée par une seule logique marchande et une politique régie par les seuls gouvernants élus, est peut-être la source première du conflit de plus en plus ouvert entre la liberté économique et la liberté politique. La voie d'une réconciliation se trouve dans la combinaison d'une économie plurielle (où coexistent des modes de production aux finalités diverses) et d'une démocratie plurielle (qui offre à la citoyenneté un autre espace d'épanouissement que le vote).
Les développements récents du mouvement associatif ont ainsi une portée économique et politique très large et offrent l'opportunité d'une réconciliation entre l'économie de marché et la démocratie. Jean- Louis Laville est professeur au Conservatoire national des arts et métiers, auteur et co-auteur d'une quinzaine d'ouvrages, parmi lesquels :
L'économie solidaire : une perspective internationale (dir.), Hachette, 2007 ; Dictionnaire de l'autre économie (dir.), Gallimard, 2006.
Si les Chinois devaient consommer autant de papier et d'automobiles que les Américains, la Chine à elle seule utiliserait plus de bois et de pétrole que le monde n'est capable d'en produire. On sait bien que la généralisation de notre modèle de croissance est matériellement impossible. Mais aujourd'hui, plus qu'une inéluctable pénurie de ressources naturelles, les spécialistes redoutent surtout que nous soyons encore en mesure d'en consommer assez pour rendre la planète invivable. Peut-on échapper à l'impasse écologique où nous conduit un mode de développement fondé sur l'accumulation et la consommation matérielle? Les écologistes radicaux soutiennent que la seule issue de secours consiste à nous engager au plus vite sur la voie de la «décroissance». Devons-nous vraiment renoncer aux transports internationaux, aux grands magasins, au réfrigérateur et au téléphone portable pour survivre? Telle est en réalité la question vitale du XXIe siècle. Quoique sans concession sur les impasses de notre mode de développement, ce livre ouvre une alternative à la décroissance et délivre une bouffée d'optimisme crédible. Si nous acceptons la révolution mentale qui consiste à repenser l'économie en fonction de l'environnement, et non l'inverse, nous disposons dès aujourd'hui des moyens techniques nécessaires pour un développement durable. Les nouvelles technologies, les énergies renouvelables et non polluantes, les politiques de la ville, la reforestation, entre autres, sont autant de pistes aujourd'hui connues, expérimentées et maîtrisées qui dessinent la route vers une éco-économie, une économie écologique et soutenable. Ce livre dresse la carte et le mode d'emploi d'une telle route.